LA PUTAIN
Je suis là pour vous plaire
Je suis là
Pour vous satisfaire
Je suis là
J'attend, j'attend depuis longtemps
J'attend le jour, j'attend tout le temps
Attend ton tour, tu en auras pour ton argent !
Je suis à toi
Fais de moi ce que tu veux !
Patiente et indolente
Un trophée de mes cheveux.
Je suis l'amour
Celui qui passe
Qui se donne un quart d'heure
Coeur et corps à qui veut
Quelle impasse !
Je repasse.
Je suis là pour vous plaire
Je suis là
Pour vous satisfaire
Je suis là
Corsage et coeur d'ange
À louer
Mon boulevard
Ton prénom ?
Ta couleur préférée ?
Noir ? Blanc ? Rouge si tu es sage !
Sous l'orage ou la neige
Par tous les temps je m'étend
Sous les draps.
Prête à porter, prête à aimer
Tes douleurs inavouées
Dans le lit où la ville se couche pour pleurer.
Tu t'y prends mal !
Car tu t'éprends
C'est moi qui donne
Et toi tu prends !
Je suis là pour vous plaire
Je suis là
Pour vous satisfaire
Je suis là...
LE JARDIN
Dans le jardin de maman
Jolies fleurs et grands tourments
Dans le jardin de maman
J'ai connu beaucoup d'amants
Les hortensias c'est bien pratique
Pour observer sans être vu
À l'âge où l'on manque de pratique
Dans les tulipes les garçons nus.
La canicule, le seringat
À peine éclos, je me souviens
Prend-moi la main, grand maladroit !
Les coquelicots... et puis, plus rien.
Toi c'est plus bas sous la glycine
Un soir de juin plein de promesses
Des noces en robe de mousseline
Et du jasmin après la messe.
Je t'offrirai la passiflore
Mais tu me fuis et je te pleure
Tu restes assis plein de remords
Moi je m'allonge dans les fleurs.
Dans le jardin de maman
Jolies fleurs et grands tourments
Dans le jardin de maman
J'ai connu beaucoup d'amants
Nous discutions sur la mousse
De fariboles bucoliques;
Il a fallu que tu me pousses
Dans un buisson de marguerites;
Vous insistiez pour voir mes roses
Je vous ai présenté ma soeur
Vêtue à la manière anglaise,
De myosotis... Une p'tite douceur ?
Un court instant, cachons-nous vite !
Vous sentez bon l'eucalyptus,
Mon mari soigne la clématite,
Me prendrez-vous près du prunus ?
Un rendez-vous, mon beau mignon
À la Saint-Georges, au magnolia
Ou sous l'arbre blanc du Japon;
Aux amarantes dans tes bras.
Dans le jardin de maman
Jolies fleurs et grands tourments
Dans le jardin de maman
J'ai connu beaucoup d'amants...
J'ai laissé beaucoup d'amants.
LE LOUP
Personne ne m'a jamais vu, idée tragique, pensée cruelle
Grande forme noire absolue, qui tue les hirondelles.
J'entretiens ce beau manège, cette immense réputation,
Depuis que tombe la neige et que j'en fais ma maison.
Si par un soir d'hiver, tu croises mon regard,
Devinant ma faiblesse au fond de mon oeil blanc :
Tu me tiens ! Tu me tiens le discours du renard
Et ta pitié me blesse plus qu'un grand couteau blanc.
Ma fierté, mon courage, pauvres, pauvres légendes !...
Je t'attrape et j' te mange, sans que tu te défendes.
- Loup ! Où es-tu ?
- Si je vis dans cette forêt c'est qu' un jour je m'y suis perdu !
- Loup ! Que fais-tu ?
- Je me morfond, je tourne en rond
Depuis qu' ils croient que j'existe plus !
- Loup ! M'entends-tu ?
- Oui ! Mais ne te retourne pas !...
Je suis tout nu !
Mangeur d'enfants, briseur de rêves, pillard, sadique, diable maudit !
Rôdeur insomniaque et pervers qui arpente vos nuits !
J'adopte ces titres de gloires, sobriquets de l'infortune,
Quoiqu'ils aient un goût amère au clair de la lune.
À peine ai-je semé la mort, que de remords
Je chante. Et toi tu prends ma plainte pour une romance !
Eh bien ! Dansons ! Accorde-moi ce corps-à-corps !
Soigne bien ta passion ! C'est ta dernière danse !
Il est trop tard, enfant de Mars ou de Saturne
Pour toucher Terre...
On n'échappe pas à sa nature.
- Loup ! Où es-tu ?
- Si je vis dans cette forêt c'est qu' un jour je m'y suis perdu !
- Loup ! Que fais-tu ?
- Je me morfond, je tourne en rond
Depuis qu' ils croient que j'existe plus !
- Loup ! M'entends-tu ?
- Oui ! Mais ne te retourne pas !...
Je suis tout nu !
J'ai tué trois vieux moutons, honoré toutes vos chèvres,
D'une voix de baryton, mystifié la bergère...
Mais la somme de vos injures efface un jour tout prestige :
Sans l'ombre de mes crimes ou de ces arbres noirs, qui suis-je ?
Long chemin, long repentir ! J'avance à découvert
Comme un héros antique, poitrail offert aux chiens.
Ils ont visé le coeur... Je meurs à la clairière...
Quand ils se précipitent... Je suis déjà loin !!
Et puis, sur mes empreintes, la neige s'amoncelle
Car la nature pardonne les fautes naturelles.
HA ! HA !
J’aime les arbres en fleurs
Et le rire des enfants
L’ infinie douceur
Du recommencement
L’ aube est stupéfiante
Au chant des oiseaux
C’ est une course lente
Qui sera le plus beau?
Je ris, je ris, je ris
La vie seule suffit
Je n’ai besoin de rien
Si ma vie m’ appartient
J’ aime les fruits sauvages
De ton corps alangui
La chaleur de l’ orage
Et jouir de l’ eau d’ un puits
A midi fais l’amour!
Et fasse qu’ on le sache!
Au milieu de la cour
Ouvre à celui que l’ on cache!
J’aime les vieux habits
Qu’ on porte sans savoir
C’ est comme le vrai ami
Qu’ on ne peut décevoir
Ce soir le ciel est rouge
Brûlant de compassion
Il faut que je te touche
Suspendre ma raison
J’aime j’aime dormir
Sous les draps blancs du lit
Dormir pour désobéir
Tout laisser et s’ enfuir
A l’ entrée de l’ hiver
Quand de terribles démons luttent
J’ entame une prière
Pour prévenir ma chute
Je ris, je ris, je ris
La vie seule suffit
Je n’ai besoin de rien
Si ma vie m’appartient
GROTESQUES
LORRAINE
Juste dans le virage
Un peu en contrebas
Au bord de la marge,
Ne cherche plus...
C'est là !
Une enseigne clignote
Il y manque deux lettres
Il y manque deux notes
Comme dans le jeu-mystère.
C'est là que tu laisses ta peine
C'est là l'autre facette
Le repaire de Lorraine
C'est là que tu t'arrêtes.
Entrée indépendante
Libre et sans contrôle
Le sas comme un passage
La porte à deux battants;
Tout de suite t'es dans ton rôle
Ici c'est évident
Tu joues ton propre personnage
Avalé dans l'image.
Lorraine est là
Qui te sourit
Elle te connaît pas
Mais c'est pas grave elle te sourit.
Elle accueille des parrains
Qui n' le sont pas vraiment,
Ils se sont fait la main
Sur une affaire de faux diamants.
Sous la boule à facettes
Qui crache des étincelles
Des couples se caressent
Devant le grand miroir;
Dis-moi que je suis belle !
Plus belle que ces pucelles !
Ô viens ! Allons voir si la rose
A bien éclos ce soir !
`
Boire ! boire !
Oublier tes déboires !
Bien diluer la déveine !
En matant les seins de Lorraine.
Deux lycéens émus
Essaient tous les alcools
Sans jamais quitter des yeux
La poitrine de la patronne
Elle leur dit: " Mes chouchous
Vous avez assez bu "
Les guidant d'une main experte:
" Celle-ci vous est offerte ! "
En gros, on voit ses seins,
Ensuite, on la voit elle,
Face à face hollywoodien
P'tit chemisier en dentelle.
Un vieux routier habitué
Depuis longtemps l'appelle maman;
Elle lui remet un jeu de clefs,
Lui tire la joue en le flattant.
Boire ! boire !
Oublier tes déboires !
Bien diluer la déveine !
En matant les seins de Lorraine.
Trois vrp en stage
Flambent dans leur costard
Champ' et nouveau challenge :
Les deux copines au bout du bar.
En sortant des toilettes
Je croise ton regard...
T'avais les yeux noisette....
Mais il est beaucoup trop tard !
...
Le ton monte d'un cran
Atmosphère de dénouement
Un type se lève
Le verre éclate
Ils l'ont sorti les yeux hagards;
Elle s'est mise à pleurer
Tu t'es rapproché d'elle...
Sa main... sa nuque... un baiser...
Boire ! boire !
Oublier tes déboires !
Bien diluer la déveine !
En matant les seins de Lorraine.
Juste dans le virage
Un peu en contrebas
Au bord de la marge,
Ne cherche plus
C'est là !
GROTESQUE
Du toit de l'Opéra Comique
Où je vais m'asseoir dans la goule
Des gargouilles que je domestique
Entre mes doigts je tiens la foule
Qu'ils sont dociles à mes harangues
Ces braves gens si ridicules
Pourtant je leur tire la langue
Un joli masque sur le cul !
Je saute au cou de la Princesse
Je me prend pour le général
Je loue l'ivresse et la paresse
Ou l'élégance provinciale !
J'suis mélomane à l'occasion
Je chante : "Vive la Liberté !"
Vers minuit la maréchaussée
Vient m'accompagner au violon !
Je suis un grotesque
La vie n'a pas de prix
Dans mes faits et gestes
Aucune monotonie !
Le jour de la fête Nationale
Barbapapa et Marche Turque
Sur le parcours archiducal
Je lève une barricade en sucres !
Avec ma carabine en bois
Et mes moustaches tire-bouchon
Je sais bien qu'ils ne font pas l' poids :
J' lance une tirade au bataillon :
" Pas de mesure, pas d'ordre, pas
De circonstancielles excuses,
Plutôt que de marcher au pas
Qu'on en finisse à l'arquebuse ! "
Cornepistrouille ! Pan ! T'es mort !
Un soir de Quatorze Juillet !
J' veux ma dépouille au Panthéon !
Même leur parade c'est pour de vrai !
Je suis un grotesque
La vie n'a pas de prix
Dans mes faits et gestes
Il n'y a point d'ennui !
Faites venir devant ma tombe
Un choeur antique et un grand gong !
Qu' Ubu, Frère Jean des Entommeurs
Entonnent un cantique tapageur !
.... Et rendez-nous Fellini !
Qu'il pleuve des fleurs !
J'y mets un point d'honneur
Et quelques confetti...
JAMAIS L’TEMPS !
Jamais l’ temps de faire un voeu
Jamais l’ temps de rire un peu
Jamais l’ temps de faire un noeud
Jamais l’ temps de faire la queue
Il faut il faut qu’ la vie ici
Sans arrêt porte ses fruits
Mais quel est donc ce joli bruit?
Une pomme est tombée dans mon lit!
Et quoi et quoi j’ la garde pour toi
Mais recrache bien tous les pépins
À quat’ pattes si je cherche bien
J’ les r’ planterai dans mon jardin
Jamais l’ temps de faire le clou
Jamais l’ temps de s’ casser l’ clou
Jamais l’ temps d’ enfoncer c’ clou
Jamais l’ temps d’ oublier tout
Je dis peut-être à l’ homme-canon
Mais je dis non à la femme sans tête
Je dis non non non non non
Et merci pour les cacahuètes!
Il faut il faut s’ faire des amis
Pour avoir l’ air très occupé
Mais ils viennent vous voir vos amis
Chaque fois qu’ vous êtes trop occupé!
Jamais l’ temps de faire un voeu
Jamais l’ temps de rire un peu
Jamais l’ temps de faire un noeud
Jamais l’ temps de faire la queue
Il faut il faut qu’ la vie ici
Sans arrêt porte ses fruits
Mais quel est donc ce joli bruit?
Une pomme est tombée dans mon lit!
Une pomme est tombée dans mon lit!
LE PROCES
- Martin! Levez-vous, Martin!
Martin, qu’avez-vous mangé à midi?
- Rien
- Pourquoi?! N’aimez-vous pas les animaux?
- Martin! Qu’ avez-vous fait cette nuit?
- J’ ai dormi
- N’avez-vous donc pas d’ amis?
- Martin! Où étiez-vous le seize octobre mille neuf cent quatre vingt
treize?
- Je ne sais pas
- Vous regardiez la mer! Ne lisez-vous pas les journaux ?!
- Quelquefois...
- Etes-vous joueur Martin?
- Pas spécialement
- Vous mentez! Lancez votre dé !
- Martin ! Vos voisins, vos enfants, votre mère vous accusent!
En conséquence, nous vous condamnons à vous réveiller!...
ALICE
Dans la chambre en silence
Voyageuse immobile
Un navire appareille
Puis disparaît
Un navire appareille
Puis recommence
À l'horizon hypothétique.
Les ombres du mobile
Viennent et vont doucement
Et dans les yeux d'Alice
Tournent des évidences.
Alice ne voudrait pas grandir
Quitter le jardin des délices
Entre rêve et réalité
Le spectacle va commencer !
Ils ont choisi le papier-peint
Tu t'es perdue dans le motif
En y retrouvant le chemin
Du labyrinthe primitif
Quelles sont ces pierres fabuleuses ?
- Des cailloux dans un sac !
Et cette étoffe précieuse ?
- Un papier dans la flaque !
Alice ne voudrait pas grandir
Quitter le jardin des délices
Entre rêve et réalité
Le spectacle va commencer !
Tu inventes une langue
Pour la flore des lagunes
Cette crique est un cirque
Et les moustiques du lac
Des monarques d'Afrique !
D'un dessin sur le sable
Tu repeuples la lune
Le monde dans tes mains s'anime
Extravagante pantomime.
LIFTIER
Pousser ma pierre sur la colline
Porte d'accès ne pas bloquer !
Prêt-à-porter et lingerie fine
À l'entresol, par l'escalier.
Aller aux astres ou au désastre
Eteignez votre cigarette !
Les luminaires sont dans l'espace
Aménagé à cet effet.
Liftier c'est mon métier
Monter, descendre et puis remonter
Tenir la verticalité
Pour le mat de la destiné !
Fuir pour ne jamais mentir
Aidez-nous à lutter contre l'envol !
Jeux, cosmétiques, brosses à reluire
Les coffre-forts sont au sous-sol.
Agir sans cesse et sans remords
Tous les abus seront punis !
Canapés, articles de sport
Nous sommes ouvert même les lundi.
Liftier c'est mon métier
Monter, descendre et puis remonter
Tenir la verticalité
Pour le mat de la destiné !
Tendre la main comme un passeur
Mettez une pièce dans l'appareil !
Réveils-matin, aspirateurs
Voyez notre ingénieur-conseil !
J’ CONNAIS UN JEU
Moi, j’connais un jeu
Un jeu passionnant
Qui développe la mémoire
Et qui se joue en mouvement.
On peut le jouer à mille
Ou bien seulement à deux
Mais seul jamais jamais
Personne ne l’ a fait!
Prend soin de ton partenaire!
Il faut de la ficelle
Beaucoup beaucoup d’ ficelle
Et quelques bouts d’papier
Qu’on va relier entre eux
Cà fait un grand manteau
A se mettre sur le dos
Un chapeau ridicule
Donne du piment au jeu!
Prend bien soin de ton partenaire!
Une fois qu’ on n’ est plus nu
On peut prendre la parole
Et dire des mots idiots
Des mots qu’ existent plus
Une fois qu’ on a parlé
Il faut aller plus haut
On peut toujours gueuler
Crier comme un oiseau!
Mais c’est toujours pareil:
Prend bien soin de ton partenaire!
C’ est la règle du jeu.
Le jeu des inventions
Le jeu des travestissements
Le jeu des métamorphoses
Le jeu de cache-cache
De loup-croqué
De chasse-nigaud
De qui-voudra-pourra
Le jeu de l’ offrande insomniaque
Le jeu de l’ intranquillité couronnée
Le jeu du hasard provoqué
Le jeu éthylique et irresponsable du vol et du don
Le jeu des sacrifices
Le jeu d’échange
Le jeu du regardeur regardé
Des amants retrouvés
Le jeu désintéressé de la réalité accomplie
Le jeu de la vie!
HI-TECH LOVE
Aux jolis mois d'été
Dans mon automobile
Je longe la vallée
Qui prolonge la ville.
J'aime chevaucher loin
Ma folle mécanique,
Tous deux ne faisons qu'un;
Essor métabolique.
De son noble courroux
Je tire ma fierté.
Sur les chapeaux de roues
Mon intrépidité.
C'est un modèle anglois
Intérieur plaqué bois
C'est écrit en anglais
Sur le mode d'emploi...
Je monte une créature
Conçue pour me séduire
Pareille à ma ouature
Toute gainée de cuir
La moue sophistiquée
Le sourire équivoque
Amour appareillé
Symptôme d'une époque
Elle tripote un diamant
Je pousse une manette
Elle ment comme une enfant
Ma manoeuvre est parfaite
Des reflets de métal
Lui effleurent la peau
Comme le son digital
De l'auto-radio...
Tout le pays défile
Surpris à cent-soixante
Devant nous immobile
La nature est vivante !
Nos yeux perdus en coeur
Aux axes métronomiques
Ont l'infinie douceur
D'ondes électroniques.
Allez fonce petit bolide !
Résous le monde entier
Dans l'impeccable fuite
De tes enfants pressés !
Plus vite ! Plus vite !
Plus belle ! Plus belle !
Plus vite ! Plus vite !
Plus belle est la campagne !
Plus vite ! Plus vite !
Plus belle ma compagne !
Décroise les genoux
C'est ta vitesse naturelle !
Dieu est content de nous !
L'INVENTEUR
Du fil de fer
Une clef anglaise
Un vieux matelas
Du caoutchouc
Des bougies
Quinze mètres de chaîne
Une scie sauteuse
Un fauteuil Louis XV
Des bois flottés
De la ficelle
Du tuyau pvc
Des plumes d'autruche
Un tourniquet...
Beaucoup d'amour et d'innocence
Très peu de science mais d'la patience
Il a le sens du non-sens
Et la justesse d'un vieux tromblon.
Ses amours mortes, ses mauvais jours
Optimisés dans un mortier
Lui font accepter la défaite
Comme matière à faire la fête.
Toujours à l' Oeuvre, il perfectionne
Un chasse-mouches, une chaise cannée;
Il agrandit des vieux klaxons
Qu'il voudrait bien voir naviguer.
Dans son garage il a vécu
Tous les grands moments historiques :
Coliseum en papier alu
Sur lunes synthétiques.
Avec du vieux il fait du neuf
Avec des plumes, par déduction,
- Toute la poule était dans l'oeuf -
Il a fait un avion...
Mais aujourd'hui rien ne va plus,
Même équipé d'un mackintosh
Le vieux coucou ne répond plus !
On ne crée pas sans anicroche...
Fébrilement il palpe encore
Le fond d'ses poches...
" Voilà mon affaire, un truc extraordinaire ! "
Trois coup d'ciseaux et un point d'colle,
Un ventilo, une chambre à air :
L'avion s'arrête au ras du sol
Et vient s'poser comme une pâqu'rette
Sur le tarmac en carton pâte
D'une aut' planète...
" C'est rigolo, j'n'imaginais pas çà d'en haut ! "
Mais l'air est pauvre en oxygène
Il ne faut pas s'laisser surprendre...
Une boite en fer américaine,
Du fil, un sac pour un scaphandre;
Un vieux tuyau sous un drap-housse
Et des lunettes anti-reflets...
" Bravo bravo ! Quel tour de force !
Un astronaute à moindre frais ! "
Les Sélénites un peu simplets
Viennent voir de près...
" Voilà mon affaire, un truc extraordinaire ! "
Et d'un vieux sac il sort des frusques
Qu'il distribue aux autochtones :
Ici un tutu et la un masque
De Sylvester Stallone !
Ils sont heureux les Sélénites
De se voir ainsi accoutrés
En star ou en héros du mythe
Qu'ils ont longtemps plébiscités.
Dans un théâtre new-yorkais
Il les fait rejouer Hamlet
Avec un texte un peu abstrait :
" Extra-terrestre ou ne pas être..."
L' art d' avant-garde n'est pas r'gardant,
On remplacera les chevaux ...
Par des brouettes !
" Par des brouettes ?
Mm... y'a p't'êt mieux à faire...
Où est passé mon chalumeau ? "
" Voilà mon affaire, un truc extraordinaire ! "
De mieux en mieux, mais qu'est-ce que c'est ?
Cà va trop vite pour l'entendement !
On dirait un d' ces vieux jouets
En métal peint pour les enfants.
C'est un engin à combustion
Un truc à base de salpêtre,
Car le moteur à explosion
Cà marche, dit-on, pourvu qu' çà...
Beaucoup d'amour et d'innocence
Très peu de science mais d'la patience
Il a le sens du non-sens
Et la justesse d'un vieux tromblon...
Des clous rouillés
Un vieux soulier
De la peinture dans la marmite
Une mandibule
Et un bâton de dynamite...
TU DORS
Tu dors tranquille
Sans bruit autour
Rien ne bouge...
Quoi ?
De l'eau qui coule
Un souffle long
Le grand lit...
Toi !
Je cours toujours
Quelle heure est-il ?
On voit rouge...
Quoi ?
Le temps qui roule
Les vents diront
Mon grand émoi.
C'est ton élan calme
Qui m'affole;
Mon accoutumance irréelle.